© Alban de Châteauvieux
u Fêté le 23 novembre u
Au vie siècle, d’intrépides moines irlandais prennent la mer pour évangéliser le continent. C’est la peregrinatio. Dans un esprit de renoncement, cette pérégrination pousse le moine à s’exiler volontairement, à abandonner les siens, son monastère, son pays, pour se rendre dans toute l’Europe occidentale. Saint Colomban est l’un de ces moines voyageurs détachés de tout, comme toutes les figures bibliques de l’exil. Comme Abraham, il obéit à l’injonction divine : « Sors de ton pays. » Comme les disciples du Christ, il quitte tout pour annoncer l’Évangile.
Un appel à la conversion
Le saint naît dans les années 540 en Irlande, dans le comté de Leinster. Il se forme d’abord auprès d’un maître, Sinell, qui l’introduit dans l’étude des Écritures. Puis il découvre la vie monastique au grand monastère de Bangor, fondé vers 555. Étape importante dans sa vie, dont il s’inspirera plus tard lorsqu’il fondera lui-même des monastères. À Bangor, il vit au rythme des offices et du travail manuel, dans un esprit d’ascèse et de pénitence. Il alterne vie cénobitique et érémitique. Imprégné de culture et de spiritualité gaéliques, il sent pourtant, vers 580, l’appel à s’expatrier. Avec douze compagnons, il obtient l’autorisation de prendre la mer. Il débarque en Bretagne armoricaine, à Saint-Coulomb, commune qui porte encore son nom près de Saint-Malo. Il y commence sa mission d’évangélisation, facilitée par sa bonne maîtrise du latin. Doué de talents d’orateur, de qualités spirituelles et humaines, il accueille ceux qui ont besoin tant de soins médicaux et de pain que d’instruction ou de nourriture spirituelle.
Un des Pères de l’Europe
Après la Bretagne, il se rend en Gaule autour de l’an 600. Nous sommes au temps des rois mérovingiens. Colomban fonde plusieurs monastères dans l’est et le centre de la France comme Annegray, Fontaine et, le plus célèbre, Luxeuil. Ce dernier, en Franche-Comté, va attirer de nombreux moines francs, gaulois et burgondes. Le rayonnement de ces monastères sera crucial dans le renouveau spirituel de l’époque. En Gaule, Colomban conserve néanmoins sa culture celte. Le voilà en conflit avec l’Église locale sur la date de Pâques. Un concile doit même se prononcer sur ce dissident irlandais qui souhaite rester fidèle à la Pâques insulaire. Avec son franc-parler et son caractère bien trempé, Colomban s’attire les foudres du roi Thierry de Bourgogne et de sa grand-mère la reine Brunehaut, dont il pourfend les vices et les crimes. Le voilà expulsé de Gaule. Le moine et ses compagnons sont conduits à Nantes en 610 afin qu’ils reprennent la mer vers leur île. Pour Colomban, il n’en est pas question. Il échappe de justesse à cette expulsion et reprend la route, vers l’Italie cette fois. Il y fonde le monastère de Bobbio où il termine sa vie le 23 novembre 615.
Peu de temps après, Jonas de Suse, moine de Bobbio de 639 à 642, écrit la Vie de saint Colomban. Avec sa règle des moines et sa règle conventuelle, Colomban aura créé le terreau favorable à la diffusion de la règle de saint Benoît hors d’Italie, laquelle s’imposera sans heurts à tous les monastères carolingiens au début du ixe siècle. n
À l’écoute de saint Colomban
Heureuse la famille qui habite dans les hauteurs du ciel, où le vieillard n’a plus à gémir, ni le petit enfant à vagir, où aucune voix ne passe sous silence les louanges de Dieu, où l’on n’a jamais faim ni soif, où le peuple du ciel se nourrit du pain des anges, où personne ne meurt, parce qu’il n’y a plus de naissance, où la cour du Roi du ciel peut paître, et où la voix du mal ne s’est jamais fait entendre. Telle est la vie future, verdoyante et vraie, où la crainte de la mort et la tristesse seront abolies. Franchie la mort, les élus verront dans la félicité le joyeux Roi. Ils régneront avec lui et se réjouiront avec lui. Alors la souffrance, l’ennui et la fatigue ne seront plus. Alors, purifiés, les élus verront le Roi immaculé, le Roi des rois !