Joachim von Sandrart est né en 1606, à Francfort, dans une famille originaire du Hainaut (nord de la France). Après Dürer, il est sans conteste le plus grand des peintres de l’école allemande. Dans cette œuvre importante, destinée à faire office de retable, l’artiste respecte bien le récit de la Pentecôte dans les Actes des Apôtres et, d’abord, la description de l’assemblée réunie : Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus, et avec ses frères (Ac 1, 14).
Sandrart représente au centre la Vierge Marie recevant une langue de feu qui lui est manifestement dédiée. Mais la Mère de Dieu ne devrait-elle pas être considérée comme déjà comblée de l’Esprit Saint, du fait de son immaculée conception ? Autrefois, la question a été très disputée parmi les peintres. De nos jours, le Catéchisme de l’Église catholique y répond positivement : « Pour la première fois dans le dessein du salut et parce que son Esprit l’a préparée, le Père trouve [en Marie] la Demeure où son Fils et son Esprit peuvent habiter parmi les hommes » (CEC, n° 721). « Il convenait que fût pleine de grâce la mère de Celui en qui habite corporellement la Plénitude de la Divinité. Elle a été, par pure grâce, conçue sans péché » (CEC, n° 722). Marie peut donc être considérée comme comblée de l’Esprit Saint dès sa conception. Cependant, la majorité des peintres, conseillés par les théologiens, ont pensé que la Vierge Marie devait être représentée comme recevant l’Esprit Saint à la Pentecôte. En effet, le fait qu’elle ait été comblée de l’Esprit Saint dès sa conception, n’empêcherait pas que, par surcroît, elle ait pu recevoir des effusions spécifiées pour des missions particulières. La promesse de l’ange à l’Annonciation, « l’Esprit Saint viendra sur toi » (Lc 1, 35), l’atteste. Il convient donc que les peintres montrent la Vierge Marie participant pleinement à l’événement fondateur de l’Église : sa présence est vitale à la Pentecôte, car sa place est à la naissance de l’Église, place unique, elle en est la Mère (cf. Lumen gentium, n° 8).
Le tableau est composé autour de la diagonale que trace l’irruption de la colombe de l’Esprit Saint dans une nuée. La projection de sa lumière bienheureuse témoigne du souffle puissant qui le manifeste. En arrière-plan, le mur monumental, mais vieilli, évoque celui du Temple de Jérusalem : l’Alliance nouvelle et éternelle va accomplir l’ancienne. En bas, deux marches indiquent que, séance tenante, les disciples vont être poussés à descendre jusqu’aux parvis du Temple, pour y rendre compte de l’Espérance qui est en eux.
Sandrart excelle à signifier les dimensions surnaturelles de l’événement par la personnalisation des expressions gestuelles et faciales des personnages. Les poses et les physionomies des Apôtres ne laissent pas d’être parlantes : l’un s’assied pour rechercher dans l’Écriture la prophétie et l’interprétation de l’événement ; l’autre, le bras levé, semble un vivant Veni Sancte Spiritus ! ; son voisin présente ses mains ouvertes, pour accueillir le don de Dieu ; celui-ci est en prière les mains jointes ; celui-là, saisi par la crainte de Dieu, se voile la face de ses mains… Sandrart fut l’un des plus grands portraitistes de tous les temps, ne manquons pas d’admirer aussi l’art subtil avec lequel il a su harmoniser avec leurs attitudes corporelles l’expression des visages des Apôtres.
Figure la plus imposante de l’assemblée, saint Pierre est représenté portant grand ouvert le livre de l’Écriture, pour signifier sa vocation propre de pasteur suprême et d’autorité doctrinale. Son visage est tourné vers la source des langues de feu, son expression est celle de celui qui écoute, avec révérence et crainte, des instructions d’une importance capitale : « Sois mon témoin à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1, 8).
Pierre-Marie Varennes
La Pentecôte, Joachim von Sandrart (1606-1688), Lambach (Autriche), église du couvent des Bénédictins. © Arthotek / La Collection.
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La naissance de l’Église
Le 1 juin 2025
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Joachim von Sandrart est né en 1606, à Francfort, dans une famille originaire du Hainaut (nord de la France). Après Dürer, il est sans conteste le plus grand des peintres de l’école allemande. Dans cette œuvre importante, destinée à faire office de retable, l’artiste respecte bien le récit de la Pentecôte dans les Actes des Apôtres et, d’abord, la description de l’assemblée réunie : Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus, et avec ses frères (Ac 1, 14).
Sandrart représente au centre la Vierge Marie recevant une langue de feu qui lui est manifestement dédiée. Mais la Mère de Dieu ne devrait-elle pas être considérée comme déjà comblée de l’Esprit Saint, du fait de son immaculée conception ? Autrefois, la question a été très disputée parmi les peintres. De nos jours, le Catéchisme de l’Église catholique y répond positivement : « Pour la première fois dans le dessein du salut et parce que son Esprit l’a préparée, le Père trouve [en Marie] la Demeure où son Fils et son Esprit peuvent habiter parmi les hommes » (CEC, n° 721). « Il convenait que fût pleine de grâce la mère de Celui en qui habite corporellement la Plénitude de la Divinité. Elle a été, par pure grâce, conçue sans péché » (CEC, n° 722). Marie peut donc être considérée comme comblée de l’Esprit Saint dès sa conception. Cependant, la majorité des peintres, conseillés par les théologiens, ont pensé que la Vierge Marie devait être représentée comme recevant l’Esprit Saint à la Pentecôte. En effet, le fait qu’elle ait été comblée de l’Esprit Saint dès sa conception, n’empêcherait pas que, par surcroît, elle ait pu recevoir des effusions spécifiées pour des missions particulières. La promesse de l’ange à l’Annonciation, « l’Esprit Saint viendra sur toi » (Lc 1, 35), l’atteste. Il convient donc que les peintres montrent la Vierge Marie participant pleinement à l’événement fondateur de l’Église : sa présence est vitale à la Pentecôte, car sa place est à la naissance de l’Église, place unique, elle en est la Mère (cf. Lumen gentium, n° 8).
Le tableau est composé autour de la diagonale que trace l’irruption de la colombe de l’Esprit Saint dans une nuée. La projection de sa lumière bienheureuse témoigne du souffle puissant qui le manifeste. En arrière-plan, le mur monumental, mais vieilli, évoque celui du Temple de Jérusalem : l’Alliance nouvelle et éternelle va accomplir l’ancienne. En bas, deux marches indiquent que, séance tenante, les disciples vont être poussés à descendre jusqu’aux parvis du Temple, pour y rendre compte de l’Espérance qui est en eux.
Sandrart excelle à signifier les dimensions surnaturelles de l’événement par la personnalisation des expressions gestuelles et faciales des personnages. Les poses et les physionomies des Apôtres ne laissent pas d’être parlantes : l’un s’assied pour rechercher dans l’Écriture la prophétie et l’interprétation de l’événement ; l’autre, le bras levé, semble un vivant Veni Sancte Spiritus ! ; son voisin présente ses mains ouvertes, pour accueillir le don de Dieu ; celui-ci est en prière les mains jointes ; celui-là, saisi par la crainte de Dieu, se voile la face de ses mains… Sandrart fut l’un des plus grands portraitistes de tous les temps, ne manquons pas d’admirer aussi l’art subtil avec lequel il a su harmoniser avec leurs attitudes corporelles l’expression des visages des Apôtres.
Figure la plus imposante de l’assemblée, saint Pierre est représenté portant grand ouvert le livre de l’Écriture, pour signifier sa vocation propre de pasteur suprême et d’autorité doctrinale. Son visage est tourné vers la source des langues de feu, son expression est celle de celui qui écoute, avec révérence et crainte, des instructions d’une importance capitale : « Sois mon témoin à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac 1, 8).
Pierre-Marie Varennes
La Pentecôte, Joachim von Sandrart (1606-1688), Lambach (Autriche), église du couvent des Bénédictins. © Arthotek / La Collection.
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