L’Assomption

Le 1 août 2025

Partager sur :

ENC_FR_AUG_25

Cliquez sur l'image pour l'agrandir

L’Assomption (après 1486), atelier d’Andrea Della Robbia (1435-1525)

Andrea Della Robbia, dont, le 4 août, nous célébrons le 500e anniversaire de la mort, est l’un des plus fameux artistes d’une des plus grandes familles de sculpteurs toscans de la Renaissance.

La délicatesse de la sculpture

La production des Della Robbia débute avec Luca, dont l’atelier de sculpture, à Florence, acquiert en quelques années une réputation qui dépasse rapidement les frontières toscanes. À la différence de ses contemporains, le sculpteur délaisse la pierre et le bronze au profit de la terre cuite émaillée et vitrifiée, mêlant ainsi habilement l’art de la sculpture avec celui de la céramique. Lorsque son neveu Andrea reprend l’atelier familial, la technique reste inchangée mais la polychromie fait une apparition remarquée. Figure incontournable de la Florence artistique, Andrea reçoit des commandes prestigieuses, comme les enfants emmaillotés qui rythment l’élévation du portique de l’hôpital des Innocents, chef-d’œuvre renaissant de l’architecte Filippo Brunelleschi. Un an auparavant, en 1486, le sculpteur avait livré un retable figurant à la fois le Couronnement et l’Assomption de la Vierge pour Santa Maria degli Angeli, à La Verna, près d’Assise. La composition, représentant l’Assomption de la Vierge, est reprise par l’atelier du maître dans d’autres exemplaires (Foiano et Fiora en Italie, la Neue Städtische Galerie de Francfort et le Victoria and Albert Museum de Londres) qui constituent une sorte de variation sur thème d’un modèle à succès. L’exemplaire que conserve le Victoria and Albert Museum de Londres provient vraisemblablement de la villa de la famille Canigiani, non loin de Poggio Imperiale, en Toscane. Il s’agit d’une version simplifiée du retable de La Verna : la Vierge, dans une mandorle rythmée par des chérubins et soutenue par six anges, remet sa ceinture (manquante) à saint Thomas, agenouillé devant la tombe fleurie de la mère du Christ. Les saints, qui figurent Grégoire, François et Bonaventure aux côtés de Thomas dans le retable de La Verna, ne sont pas représentés ici. L’accent est ainsi mis sur l’échange entre l’Apôtre et la Vierge dont l’expression des visages est caractéristique de la manière d’Andrea Della Robbia. La délicatesse des modelés est rehaussée par le contraste de bleu et de blanc, et quelques touches de vert, de brun et de jaune pour les caissons ainsi que les lys et les marguerites qui ont fleuri dans la tombe.

La sollicitude de Marie

Célébrant l’Assomption de Marie, dont le dogme ne fut proclamé qu’en 1950 par la constitution apostolique Munificentissimus Deus du pape Pie XII, l’iconographie exalte la sollicitude de Marie pour saint Thomas. L’Apôtre peinait à croire ce que les disciples lui avaient rapporté et que la constitution dogmatique Lumen gentium résume : « Enfin, la Vierge immaculée, préservée de toute tache de la faute originelle, au terme de sa vie terrestre, fut élevée à la gloire du ciel en son âme et en son corps et elle fut exaltée par le Seigneur comme Reine de l’univers afin de ressembler plus parfaitement à son Fils, Seigneur des seigneurs et vainqueur du péché et de la mort » (n° 59). Le Transitus Maria, dont l’origine remonte aux IIe et IIIe siècles, évoque déjà l’Assomption de la Vierge. Mais ce sont des écrits apocryphes des VIIe et VIIIe siècles qui rapportent que Thomas était absent lors de l’élévation du corps de Marie au ciel. La Vierge fit tomber sa ceinture, « intacte et encore nouée » comme preuve de son Assomption. C’est la sollicitude de Marie pour Thomas l’incrédule qui est figurée sur le retable de l’atelier d’Andrea Della Robbia : l’Apôtre s’est agenouillé pour recueillir la ceinture – ou maphorion (manteau) – de la mère de son Seigneur. Sans doute conservée à Jérusalem, puis à Constantinople, la précieuse relique aurait été déposée au XIIIe siècle à la cathédrale de Prato (Italie), suscitant dès lors, et en particulier en Toscane, le développement d’un nouveau thème iconographique marial.

La participation de Marie à la victoire de la croix

Célébré le 15 août par les catholiques, le dogme de l’Assomption est lié à celui de l’Immaculée Conception : conçue sans péché, Marie est glorifiée en son âme et en son corps. Elle a connu la mort, mais son corps n’a pas connu la corruption. Cette vérité de foi oppose catholiques et orthodoxes. Pour ces derniers, qui évoquent la Dormition et non l’Assomption, l’âme de Marie est accueillie par le Père, mais son corps, incorruptible, attend la résurrection. Saint Jean-Paul II évoqua à plusieurs reprises l’Assomption de Marie. Lors d’une audience générale, le 2 juillet 1997, il expliquait que le dogme « exige l’adhésion expresse de tous les Chrétiens » et qu’il trouve sa justification dans l’union de Marie à son fils : « Cette union, qui se manifeste, dès la conception prodigieuse du Sauveur, par la participation de la Mère à la mission de son Fils et surtout par son association au sacrifice rédempteur, ne peut pas ne pas exiger une continuation après la mort. Parfaitement unie à la vie et à l’œuvre salvifique de Jésus, Marie partage son destin céleste avec son âme et son corps. […] L’Assomption est donc le point d’arrivée de la lutte qui a mobilisé l’amour généreux de Marie pour la rédemption de l’humanité, et elle est le fruit de sa participation unique à la victoire de la Croix. » L’amour généreux de Marie fut chanté par tant de saints ! Saint Maximilien Kolbe qui l’aimait tant, nous invite, à sa suite, à la prier :

« Ô Mère de Jésus,
tendresse de l’Esprit Saint,
que la création entière puisse avec toi
célébrer la louange de la miséricorde
et de l’amour infini de Dieu. »

Sophie Mouquin

Maitre de conférences en hitoire de l’art moderne à l’université de Lille.

Pour aller plus loin

–  Zuzanna Sarnecka, The Allure of Glazed Terracotta in Renaissance Italy, Londres, Harvey Miller, 2021.

–  Jean-René Gaborit, Marc Bormand, Les Della Robbia. Sculptures en terre cuite émaillée de la Renaissance italienne, cat. exp. Sèvres et Nice, Paris, RMN, 2002.

–  Giancarlo Gentilini, I Della Robbia e l’”arte nuova” della scultura invetriata, cat. exp. Fiesole, Basilica di Sant’Alessandro, 29 mai-1er novembre 1998, Florence, Guinti, 1998.

L’Assomption (après 1486), Andrea Della Robbia (1435-1525), Victoria and Albert Museum, Londres. © akg-images / WHA / World History Archive

Partager sur :