« Les laudes, comme prières du matin, et les vêpres, comme prières du soir, qui, d’après la vénérable tradition de l’Église universelle, constituent les deux pôles de l’office quotidien, doivent être tenues pour les Heures principales et elles doivent être célébrées en conséquence (1). » Lorsque le dernier concile met en œuvre la réforme de l’Office divin, il insiste sur ce qui, depuis l’origine du christianisme, est le « noyau dur » de la prière des Heures : la prière du matin et la prière du soir.
Cycle cosmique et cycle pascal
Prier le matin et le soir n’est pas l’apanage de la foi chrétienne. Tout homme religieux harmonise sa vie de prière sur le cycle cosmique, l’alternance des jours et des nuits, du lever et du coucher du soleil, le rythme des saisons, etc. La prière d’Israël suit ce même mouvement, mais, plus que le simple cycle cosmique, elle célèbre le temps marqué par l’action de Dieu dans la vie du peuple saint. De même, la prière des Heures recouvre tout le déroulement du jour, en insistant sur le soir et le matin au regard du mystère pascal vécu par le Christ.
Au soir tombant
Lorsque la lumière tend à disparaître, l’Église évoque le sacrifice du soir. Certes, en référence au sacrifice du soir présenté au Temple tel que le psaume 140 l’évoque : Que ma prière devant toi s’élève comme un encens, et mes mains, comme l’offrande du soir (v. 2), mais surtout « dans un sens encore plus sacré, comme le véritable sacrifice du soir [que le Christ] a offert au Père par l’élévation de ses mains, pour le salut du monde entier (2) ». C’est à cette heure, quand l’ombre s’installe, qu’il convient de redire avec force l’espérance chrétienne. Au-delà de la nuit de la mort, nous attendons l’inouï de la grâce divine : « Toi dont le jour n’a pas de fin, reste avec nous quand tout s’efface. […] Comme un veilleur attend l’aurore, nous appelons le jour promis (3). » Fortifiés par l’espérance, nous intercédons pour le monde encore marqué par les ténèbres.
Dans l’aurore du jour nouveau
Et quand la nuit cède le pas au jour, nous nous plaçons dans la lumière du Ressuscité. Nous suivons ses pas pour rendre grâce au Père pour son œuvre de salut. Dans le matin, le soleil levant vient nous visiter pour illuminer ceux qui habitent les ténèbres (cantique de Zacharie). La louange – laudes en latin – est la marque de cette prière du matin, parce que le Christ, vraie lumière qui éclaire tout homme (Jn 1, 9), nous apprend ce que lui seul peut donner, le débordement de joie (Ps 15, 11) qui caractérise la vie du Royaume. Dieu nous appelle « à cette joie que rien, pas même la mort, ne pourra nous ravir (4) ». La prière du matin consacre à Dieu les premiers mouvements de notre âme et de notre esprit, elle met notre journée dans le mouvement de la résurrection.
Plus qu’à l’aspect cosmique, la liturgie des Heures s’attache à nous faire vivre au rythme du mystère pascal du Christ.
1. Constitution sur la liturgie, n° 89a.
2. Cassien, PL 49, 124.125, cité dans PGLH, n° 39.
3. C. Duchesneau.
4. Bénédiction solennelle de Pâques.