Magnificat

Les trésors de la rédaction

Que ton nom soit sanctifié

Par P. Guillaume de Menthière

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Dans ce passage du Notre Père, nous ne demandons évidemment pas que le nom du Seigneur soit saint, car il l’est de toute éternité. Ce que nous souhaitons, c’est qu’il soit reconnu comme saint et traité comme tel, que sa sainteté éclate aux yeux de tous.

Spontanément, avouons-le, nous aurions peut-être tendance à prier en disant : Notre Père, délivre-nous du Mal, donne-nous du pain… Nos besoins de protection, de nourriture nous paraissent plus urgents que la sanctification du nom de Dieu.

Un préalable

Pourtant pour être exaucée, toute requête ne doit-elle pas être formulée dans le nom du Seigneur ? Jésus dit en effet à ses disciples : Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai (Jn 14, 13). Avant de prier dans le nom du Seigneur, il est juste que nous nous préoccupions de ce nom lui-même.

La première des demandes est ainsi la plus importante de toutes. Un passage obligé, sine qua non. « Elle exprime notre désir de la gloire de Dieu », dit simplement Thomas d’Aquin. Elle nous retient d’infléchir nos prières dans un sens individuel et utilitaire. C’est la leçon que François d’Assise donne à frère Léon : « Ah ! frère Léon, ne te préoccupe pas tant de la pureté de ton âme. Tourne ton regard vers Dieu. Admire-le. Réjouis-toi de ce qu’il est, lui, toute sainteté. »

Les intérêts de Dieu passent avant nos intentions. Le vrai chrétien est anxieux avant tout de l’honneur de Dieu. Est-ce là une notion désuète ? Que peut bien signifier pour nos contemporains l’honneur de Dieu, sinon le souvenir cruel de bien des forfaitures commises sous le prétexte de cette noble cause ? Comment retrouver un sens juste de la sanctification du nom de Dieu ? Comment entendre aujourd’hui les très nombreux textes bibliques où Dieu se montre si jaloux de la sainteté transcendante de son nom ?

Complément d’agent ?

Nous ne demandons évidemment pas que le nom du Seigneur soit saint, car il l’est de toute éternité. Ce que nous souhaitons, c’est qu’il soit reconnu comme saint et traité comme tel, que sa sainteté éclate aux yeux de tous. Or sanctifier le nom, c’est déjà ne pas le profaner. C’est-à-dire ne pas le mettre à toutes les sauces ni le faire servir à nos intérêts. Il faut certes s’abstenir de jurons, de serments, de pratiques magiques qui prennent à faux le nom de Dieu. Mais bien plus encore se garder de couvrir nos activités injustes, malhonnêtes ou criminelles de la caution divine. Quand on songe à tous les crimes qui ont été commis soi-disant « au nom de Dieu », on comprend que cela n’a rien d’anodin.

Si nous admettons que « sanctifier le nom » signifie manifester la gloire de Dieu, reste à savoir qui est en mesure d’accomplir cette tâche. Car, on l’aura remarqué, la demande du Notre Père semble ne pas préciser ce point. « Que ton nom soit sanctifié », d’accord, mais par qui ? Il manque à cette demande un complément d’agent. À vrai dire, il n’y a guère que deux possibilités : soit c’est Dieu lui-même qui sanctifie son nom, soit c’est aux hommes de le faire.

Évidemment la première hypothèse a pour elle l’oracle d’Ézékiel où Dieu annonce : Je sanctifierai mon grand nom (Ez 36, 23), et d’autres passages bibliques où l’on demande à Dieu de rendre gloire à son nom (Ps 115, 1). D’ailleurs Dieu n’est-il pas le mieux à même et, à vrai dire, le seul tout à fait à même de faire éclater sa gloire ? Or il le fait principalement en se constituant un peuple qui sanctifie son nom. On comprend dès lors qu’il n’est pas contradictoire de dire à la fois que c’est Dieu qui sanctifie son nom et que ce sont les hommes qui sanctifient le nom de Dieu.

Total engagement

Dieu étant sagesse, bonté, vérité, droiture, etc., sanctifier son nom, c’est pratiquer toutes ces vertus qui sont autant de nominations de notre Dieu. À l’inverse, autant de vices autant de blasphèmes du saint nom. Être impur, médisant, coléreux, haineux, etc., c’est profaner le saint nom de Dieu qui a été invoqué sur nous, c’est mettre son corps et son âme au service du diable alors qu’ils sont faits pour le service de Dieu. « C’est comme un prêtre qui donnerait à boire à une truie dans le saint calice ou qui avec lui puiserait du fumier pourri », s’exclame Luther dans son langage expressif ! C’est bien ainsi que le nom de Dieu peut être soit profané soit sanctifié, non seulement de bouche mais par tout notre être et notre agir. « Cette parole nous apprend à diriger notre vie dans le chemin de la vertu », dit Jean Chrysostome, c’est comme si nous disions à Dieu : « Daignez, s’il vous plaît, régler et purifier notre vie de telle sorte que tout le monde vous glorifie en nous voyant. » On voit ainsi l’exigence que comporte la première demande du Pater. Ce n’est pas un souhait ou un vœu pieux, mais un engagement de tout notre être!

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P. Guillaume de Menthière

Curé de paroisse et chargé de cours à l'École cathédrale de Paris, Guillaume de Menthière est l'auteur d'ouvrages spirituels. MGF no 307, juin 2018

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